Favoriser l’adhésion des Mineurs Non Accompagnés à Calais et Dunkerque

Récemment, l’ACPE a formé 5 associations engagées sur le terrain dans les jungles de Calais et Dunkerque à l’approche motivationnelle et expérientielle. L’objectif était de permettre à ces acteurs de mettre en pratique cette méthode auprès des Mineurs Non Accompagnés (MNA) afin de favoriser leur adhésion aux dispositifs d’accompagnement et d’insertion.

Un public réfractaire à l’insertion en France

Le public de MNA à Calais et à Dunkerque est difficile d’accès. Ces jeunes peuvent exprimer des besoins primaires, comme ceux d’avoir un hébergement, des vêtements chauds ou de la nourriture, mais n’adhèrent que très rarement aux dispositifs d’accompagnement destinés à l’insertion en France. Et ce pour de nombreuses raisons :

L’objectif de ces jeunes est de rejoindre l’Angleterre, car on leur a présenté ce pays comme celui de la réussite. L’insertion en France ne les intéresse pas.

Pour nombre d’entre eux, ils sont issus d’un milieu précaire, ont connu une histoire familiale compliquée et ont vécu un parcours migratoire traumatisant, durant lequel ils ont pu être victime de violence ou d’exploitation. Ce passé a grandement altéré leur confiance envers les adultes ou la société en générale.

Ces jeunes ont souvent contracté une dette pour leur trajet jusqu’en Europe et sont sous la menace des trafiquants s’ils ne s’en acquittent pas. Ils doivent donc rapidement gagner de l’argent, quel que soit le moyen à utiliser.

La plupart du temps, ces adolescents sont envoyés par leur entourage pour réussir en Europe et envoyer de l’argent à la famille au pays. Ils ne peuvent pas se permettre d’échouer, c’est une histoire d’honneur et de loyauté.

Toutes ces raisons font que ces adolescents ne comptent que sur eux-mêmes pour réussir et sont prêts à utiliser tous les moyens qui se présentent à eux pour gagner de l’argent rapidement. Ils sont ainsi très fortement exposés aux risques de traite, et très peu enclin à adhérer aux dispositifs d’insertion en France.

Et pourtant, ce ne sont que des enfants, qui ont essentiellement besoin d’accompagnement pour soigner leurs traumatismes, se reconstruire, former un vrai projet de vie et avoir une chance de s’insérer dans la société.

Une approche sans jugement, centrée sur l’adolescent

C’est pourquoi l’approche motivationnelle et expérientielle, qui a fait ses preuves à l’ACPE auprès d’un public d’adolescents à risque d’exploitation sexuelle, semblait intéressante à partager aux associations engagées sur le terrain à Calais et Dunkerque.
En effet, le vécu de ce public de MNA a une incidence lourde sur leur potentiel adhésion à un dispositif d’accompagnement ou un projet d’insertion en France.

A partir de là, l’objectif est d’établir un lien positif et naturel avec le jeune, sans jugement ni à priori, en s’intéressant premièrement à lui : qui il est, où il en est dans son parcours de vie, quelles sont ses envies, ses capacités, ses motivations, ses affinités…

L’approche motivationnelle va ensuite essayer, à partir de ces éléments, de donner envie au jeune de s’engager dans un projet de vie et d’insertion qui répondrait à ses attentes.

Cette approche est dite expérientielle car elle passe par le jeu. La relation est facilitée car elle n’est pas vécue comme une confrontation avec l’adulte, mais une expérience ludique à travers laquelle l’adolescent va pouvoir parler de lui, exprimer son ressenti, ses besoins, ses désirs de façon naturelle.

C’est ainsi qu’une relation spontanée peut s’établir avec le jeune, au sein de laquelle la confiance peut s’installer, ainsi que le désir d’opter pour un projet de vie positif et constructif, loin de l’exploitation et de l’illusion d’une réussite facile en Angleterre.

Les 5 associations de terrain à Calais et Dunkerque qui ont bénéficié de la formation vont donc pouvoir mettre en pratique cette approche auprès des jeunes et la partager autour d’eux.
 

Article écrit en collaboration avec Hélène David, responsable du pôle d’accompagnement psycho-éducatif adosexo à l’ACPE.