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Favoriser la coopération franco-colombienne dans la lutte contre la traite

Au regard de la recrudescence de victimes d’exploitation sexuelle Colombienne en France, l’ambassade française en Colombie a lancé une action destinée à favoriser la coopération entre la France et la Colombie dans la lutte contre la traite. Elle se poursuivra jusqu’en avril 2025.

L’action a pour objectifs :

  • De favoriser la coopération internationale entre les forces de l’ordre Françaises et Colombiennes lors des investigations sur des affaires de traite impliquant les 2 pays
  • D’améliorer la prévention, la protection et l’accompagnement des victimes, portées par les associations des 2 pays

Le projet fait intervenir plusieurs acteurs dont :

  • L’ Office Central pour la Répression de la Traite des Êtres Humains (OCRTEH), intervenant pour la mise en place de la collaboration internationale des autorités judiciaires françaises et Colombiennes
  • L’AFJ, association spécialisée dans l’accompagnement des victimes de traite à des fins d’exploitation sexuelle, intervenant dans le but d’améliorer les pratiques en termes de protection et d’accompagnement des victimes dans les 2 pays

Concrètement, le projet prévoit :

  • Des actions de formations auprès des magistrats et policiers à Bogota dispensées par des agents de l’OCRTEH , avec la participation des membres d’AFJ, essentiellement destinées à encourager la coopération internationale et la collaboration entre la police et les associations.
  • Des stages d’immersion en France et en Colombie pour des enquêteurs et magistrats des 2 pays afin de mieux comprendre le contexte international de cette forme de traite et initier des pratiques de coopération.
  • Des visites inter-associatives entre les associations partenaires des 2 pays dans les contextes de traite à Paris et Bogota afin d’appréhender la réalité des victimes de chaque pays et d’améliorer les pratiques des acteurs sur le terrain.
  • La présentation d’une étude comparée des législations françaises et Colombiennes dispensée aux policiers et magistrats des 2 pays afin qu’ils maîtrisent les systèmes juridiques de chaque pays.

La prostitution en voie de légalisation en Colombie

En Colombie, la prostitution n’est pas illégale et mais pas totalement réglementée. Les femmes qui se prostituent sont considérées comme des travailleuses du sexe dans des zones dites « de tolérance ». Même si la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle et le proxénétisme est pénalisé , le contexte est un terrain favorable au développement de l’exploitation et la traite.

En réalité, la prostitution en Colombie touche essentiellement des femmes vulnérables, dont une part importante de mineures, et se déroule dans des quartiers très pauvres appartenant à des gangs. Ces derniers organisent la prostitution, hébergent les femmes et les surveillent.

Certaines d’entre elles fuient ces conditions de vie pour se rendre en Europe. Elles tombent alors entre les mains des réseaux de traite qui les exploitent sexuellement.

Cette différence de législation entre les 2 pays donne tout son sens à l’étude comparée de ces 2 systèmes juridiques. Dans le cadre de la collaboration internationale, les policiers et magistrats français et colombiens doivent connaître les lois de chaque pays afin de pouvoir agir ensemble et mener à bien les enquêtes sur les affaires de traite.

Ce travail de coopération international peut également relancer le débat politique sur la légalisation de la prostitution en Colombie en sensibilisant les pouvoirs publics sur les réalités de la traite à des fins d’exploitation sexuelle qui se déroule dans leur pays et qui touche leurs ressortissants à l’étranger.

Encourager la collaboration entre les associations et les autorités colombiennes

Lors des formations dispensées aux policiers et magistrats colombiens, l’OCRTEH est intervenu pour améliorer les pratiques des agents lors des enquêtes sur des affaires de traite. Le but est alors de pouvoir collaborer efficacement entre les deux pays.

Dans ce cadre, AFJ est intervenu pour encourager la coopération entre les associations et la police. En témoignant de leur expérience française, les membres de l’association ont pu montrer les intérêts d’une telle collaboration :  

  1. En mettant immédiatement les victimes à l’abri et en les rassurant, l’association les mets dans les meilleures conditions pour coopérer avec la police lors des auditions si précieuses au déroulement de l’enquête
  2. Les victimes ainsi protégées sont suivies et restent accessibles pour le cas où la police souhaite les revoir pour les besoins de l’enquête.
  3. En étant immédiatement prises en charge, le risque de réexploitation des victimes est fortement diminué
  4. Quand la police prévient les associations en amont d’un démantèlement, elles peuvent se préparer à accueillir les victimes dans des conditions optimums

Ce travail de collaboration doit se faire dans un climat de confiance mutuelle, motivé par les intérêts que chacun peut trouver dans une telle démarche, le tout au bénéfice des victimes.

Optimiser les retours au pays

Parmi les femmes victimes de traite en France, nombreuses sont celles qui ne sont pas en capacité de retourner en Colombie, soit en raison des menaces qui pèsent sur elles, soit car les conditions qui les attendent sont trop précaires et présentent un fort risque de réexploitation.

En Colombie, le système proposé aux femmes qui souhaitent revenir est axé sur la réinsertion professionnelle mais il n’inclue pas la protection et la mise à l’abri. Il est de ce fait défaillant pour les femmes victimes de traite en danger et ne garantit pas leur sécurité.

Suite à la collaboration entre les associations colombiennes et françaises, AFJ travaille sur un programme de retour au pays volontaire et sécurisé.

L’objectif est de proposer à ces femmes un système qui leur assure la réinsertion professionnelle, mais aussi un cadre de vie sûr et des conditions de vie décentes.

En parallèle, les associations partenaires travaillent ensemble sur un outil de prévention à destination des populations colombiennes à risque de traite désireuses de rejoindre la France.
 

L'association AFJ

C’est une association comprenant un foyer de mise à l’abri de 14 places et un appartement de 3 places à destination des femmes victimes de traite à des fins d’exploitation sexuelle.

Elle propose un accompagnement global des victimes : mise à disposition d’un hébergement, suivi administratif (ouverture des droits et régularisation administrative), suivi psychologique, actions éducatives d’insertion (apprentissage du français, accompagnement d’insertion professionnelle). Des activités sont proposées aux femmes au sein du foyer.

L’Accompagnement est effectué par une équipe de professionnels et des bénévoles. 


Article écrit en collaboration avec Yolanda Gutierrez, directrice d’AFJ