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Bilan et perspectives sur le Parcours de Sortie de Prostitution

Depuis la création du Parcours de Sortie de Prostitution (PSP) en 2016, 1177 personnes ont bénéficié de ce dispositif pour s’extraire du système d’exploitation sexuelle et s’insérer socialement.

Le Parcours de Sortie de la Prostitution a été créé suite à la loi du 13 avril 2016. En effet, celle-ci considère que la personne en situation de prostitution est en réalité victime d’un système d’exploitation et qu’elle doit être aidée et accompagnée pour s’en extraire. C’est tout l’objet de ce dispositif, effectif sur le terrain depuis 2017.

Bref rappel sur le Parcours de Sortie de Prostitution

Le Parcours de Sortie de la Prostitution dénommé PSP est un engagement tripartite entre :

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La personne victime
qui s’engage à quitter le système prostitutionnel

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La préfecture
qui délivre à la personne victime une autorisation provisoire de séjour et une aide financière d’insertion

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Une association agréée
qui accompagne la personne vers l’insertion, l’obtention d’un CDI et d’un hébergement en dehors du réseau

 

Le parcours s’étale sur une période de 2 ans, à l’issue de laquelle la personne doit avoir obtenu un hébergement et un CDI afin de pouvoir rester en France. Dans le cas contraire, elle est renvoyée dans son pays d’origine.

L’issue d’un long processus d’accompagnement

En réalité, le Parcours de Sortie de la Prostitution n’est que le résultat d’un processus d’accompagnement plus long. En effet, pour que le parcours soit une réussite pour les personnes qui s’y engagent, il est nécessaire de les préparer en amont afin qu’elles soient prêtes à se lancer dans une démarche d’insertion.

Car une grande majorité des femmes en situation de prostitution sont en réalité victimes de traite. Elles ont pour la plupart vécu un parcours migratoire traumatisant et violent avant d’arriver en France. Elles sont également souvent dépendantes du réseau qui les exploite, car celui-ci les héberge et représente une communauté sociale de personnes parlant la même langue qu’elles.

Pour les associations d’aide aux victimes de traite, la priorité est dans un premier temps de soigner les traumatismes liés à leur vécu par un accompagnement sanitaire, psychologique et social dont le but est la reconstruction de la personne.

Il s’agit ensuite de les convaincre qu’elles peuvent s’affranchir du réseau et avoir droit à une vie meilleure en s’engageant dans une démarche d’insertion.

Pour des personnes étrangères qui ont été victimes de violence, qui ont vécu une grande partie de leur vie sous emprise, qui ne parlent pas français et qui ne sont parfois jamais allées à l’école, c’est un processus qui s’inscrit dans la durée avant de porter ses fruits.

Le processus d’accompagnement des victimes avant d’entrer en Parcours de Sortie de Prostitution

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Rencontre avec les personnes victimes lors des maraudes

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Création d’un premier lien grâce au travail de rue

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Accompagnement sanitaire, social et psychologique
sur le lieu d’accueil
en vue de la reconstruction de la personne

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Préparation à l’engagement dans un processus d’insertion

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Entrée en Parcours de Sortie de Prostitution

 

La difficulté à obtenir un hébergement

Une fois la personne prête à s’investir dans une démarche d’insertion, la priorité est de lui trouver un hébergement car l’entrée en Parcours de Sortie de la Prostitution nécessite d’être logé en dehors du réseau. Or, aujourd’hui en France, l’hébergement d’urgence est saturé. Il est donc parfois très long d’obtenir un logement, ce qui peut décourager certaines femmes de s’engager dans un Parcours de Sortie de la Prostitution.

Pour favoriser la réussite des Parcours de Sortie de Prostitution, une solution serait d’améliorer la collaboration avec le SIAO (Service Intégré d'Accueil et d'Orientation) en réservant des places en hébergement d’urgence aux candidates à l’entrée en Parcours de Sortie de la Prostitution.

Un temps trop court pour une insertion qualitative

Par ailleurs, le Parcours de Sortie de la Prostitution ne laisse que 2 ans aux personnes pour s’insérer en France et obtenir un emploi stable.

Pour des femmes étrangères, peu coutumières de la société occidentale, qui ne parlent souvent pas le français, cela demande une adaptation très rapide au système français.

De ce fait, s’il est possible d’obtenir un CDI durant cette période, il est en revanche beaucoup plus compliqué de mettre en place une insertion qualitative adaptée aux besoins et aspirations de la personne au bout des 2 ans.

En allongeant la durée du parcours, les femmes auraient plus de temps pour mieux maitriser le français, découvrir la société française et s’y adapter, affiner leur projet professionnel et se former au métier qui les intéresse.

L’équilibre de ces femmes et la solidité de leur insertion passe par là.

 

Aux Captifs, la Libération

L’association Aux Captifs, la Libération est née en 1981 pour aller vers les personnes à la rue en situation de précarité à l’intérieur de Paris, aux Bois de Boulogne et Bois de Vincennes ; avec aujourd’hui 25 maraudes hebdomadaires à destination des personnes en situation de rue ou/et d’exploitation sexuelle ou de prostitution, parfois victimes de traite des êtres humains.
Elle a aussi des équipes bénévoles à Bordeaux, Lyon et Nîmes.

Le cœur de sa mission est d’aller à la rencontre des personnes sur leur lieu de vie et ou d’exploitation. L’idée est d’aider chacun et chacune à construire un projet de vie, pouvant aller jusqu’à la sortie de la prostitution.

Les équipes de bénévoles et de salariés ont développé une expertise dans la rencontre, l’identification, l’accueil et l’accompagnement des personnes.

L’association propose également des permanences d’accueil et un accompagnement global à travers accompagnement social, accès au soin et au droit grâce à un maillage associatif adapté.

Les propositions de l’association visent à favoriser la liberté de choix des personnes dans leurs parcours. L'association déploie des activités de mobilisation /dynamisation ainsi que des séjours de rupture, comme autant de leviers de reconstruction vers une capacité à exercer sa liberté voire une insertion.

L’identification spécifique des victimes de traite aux fins d’exploitation sexuelle, mineures et majeures, est une des priorités de l’association ; tout comme la sensibilisation des pouvoirs publics et de la société aux problématiques liées à la traite des êtres humains.

L’association est agréée depuis 2017 par l’Etat pour accompagner des parcours de sortie de prostitution et de traite à des fins d’exploitation sexuelle.

 

Article écrit en collaboration avec Gilles Badin, directeur opérationnel à Aux captifs la libération, en charge du pôle prostitution, exploitation sexuelle et traite des êtres humains.