Hors la rue accompagne des mineurs vivant à la rue, en bidonville, ou en squat. Ce public, particulièrement vulnérable, éprouve des difficultés à saisir l’urgence sanitaire actuelle et souffre particulièrement du confinement. Face à cette situation, de nouvelles solutions sont mises en place pour garder le lien avec ces jeunes et répondre à leurs besoins.
L’impact de l’épidémie sur les mineurs en danger
Errance et confinement
Dans cette période de crise sanitaire, les mineurs en grande errance sont un public à risque. Ils éprouvent de grandes difficultés pour trouver un lieu où vivre le confinement et s’exposent ainsi à la contamination par le Covid 19.
Un accès difficile aux informations
Par ailleurs, ces mineurs sont assez éloignés des institutions et méconnaissent souvent la langue française. Autant de facteurs qui rendent compliqué l’accès aux informations liées aux mesures de confinement et aux gestes barrières à respecter pour se protéger et préserver son entourage.
L’isolement source de détresses psychiques
Pour les mineurs mis à l’abri en chambre d’hôtel, l’isolement est difficile à vivre. La solitude et l’absence de lien social provoquent des troubles psychologiques chez des jeunes déjà fragilisés.
Un ravitaillement parfois compliqué
Pour les jeunes vivant en bidonville, éloignés des commerces, les mesures de confinement les empêchent de subvenir à leurs besoins alimentaires.
Tous ces éléments font que certains mineurs sont dans l’impossibilité de respecter les mesures de confinement.
La réponse de la société civile
L’enjeu, pour Hors la Rue, est de plusieurs ordres :
- Informer les jeunes des mesures de confinement
- Sensibiliser les mineurs aux enjeux sanitaires et aux gestes qui leurs permettront de se protéger et de préserver leur entourage
- Conserver un lien social avec les jeunes pour prévenir les souffrances psychologiques liées à l’isolement
- Subvenir, de façon exceptionnelle, aux besoins alimentaires de ceux qui sont dans l’incapacité de le faire.
Dans tous les cas, il est primordial de maintenir le lien avec ces jeunes pour répondre à leurs difficultés actuelles.
Conservation du lien à distance
Il se prolonge essentiellement par téléphone, Facebook ou Messenger, car les jeunes sont très présents sur ces réseaux, mais également en vidéo-conférence. Ces médias permettent d’informer les jeunes sur les mesures de confinement et l’intérêt de les respecter ainsi que sur les gestes barrières pour se protéger. Des vidéos en plusieurs langues sur ces sujets ont été diffusées aux jeunes. Le maintien du lien permet aussi de rassurer les mineurs en souffrance psychique et de leur permettre de franchir ce cap. La psychologue de l’équipe a également maintenu les entretiens avec les jeunes qu’elle suit par téléphone.
L’art thérapie en visio
Des sessions d’art thérapie en visio ont été proposées aux jeunes. Cela permet de briser l’isolement, de conserver un lien social et d’exprimer leur ressenti de la situation tout en pratiquant une activité constructive et ludique. Cela fonctionne très bien pour les jeunes souffrant de la solitude.
Des maraudes à vélo
Depuis le 26 mars, les maraudes ont repris sur la base du volontariat selon les besoins recensés par la ville de Paris. Elles priorisent le secteur nord est parisien : La Chapelle, Belleville, la goutte d’or, gare du nord, gare de l’est. Elles se font à vélo pour éviter les transports en commun et favoriser la mobilité rapide pour répondre aux besoins des mineurs en danger. Elles se limitent à 3 heures, durée de vie des masques mis à disposition par un partenaire institutionnel. Elles sont soumises au respect des règles de distanciation et il est recommandé de ne pas s’approcher de groupes de plus de 3 personnes.
Le but des maraudes actuelles est vraiment de repérer, d’informer, d’orienter les mineurs et jeunes majeurs en errance, mais également de veiller aux potentielles violences policières sur le terrain. Elles nous permettent de transmettre des attestations et de la documentation sur les gestes barrières. Lors de ces tournées, l’équipe a pu conduire certains jeunes vers les 2 gymnases destinés à l’accueil des mineurs pendant cette période. Julie Jardin.
Des visites à domicile
A partir de la deuxième semaine de confinement, des visites à domicile ont été organisées pour les mineurs les plus isolés en souffrance psychologique. Dans certains cas, des courses ont été livrées aux jeunes dans le besoin.
Une organisation du travail à distance
Pour coordonner le travail d’équipe, des réunions hebdomadaires en visio ont été organisées et des groupes Whatsapp par thématique ont été créés. Un journal d’appel est tenu par l’équipe d’éducateurs et sa coordinatrice. Il recense tous les besoins évoqués par les jeunes, ce qui permet d’orienter l’accompagnement en fonction.
Une collaboration inter-associative pour répondre au mieux aux besoins des victimes
Dans ce contexte particulier, les associations ont décidé de collaborer. Des tournées sont organisées avec France terre d’asile pour répondre aux besoins des jeunes sur le terrain.
Un tableau recensant tous les besoins des mineurs en bidonville est transmis à un collectif inter associatif afin que chaque association soit en mesure d’envisager des actions en fonction.
L’après Covid-19
Le partenariat inter-associatif
La collaboration accrue entre associations née de l’urgence de la situation pourrait perdurer après la crise sanitaire. Elle permet de répondre aux besoins des jeunes de façon plus spécifique, chaque acteur en fonction de son savoir-faire.
L’expérience des réunions en visio avec les partenaires permet d’éviter de perdre du temps dans les trajets. Ce dispositif pourra être maintenu à l’avenir pour faciliter les échanges avec les associations ou institutions.
Enfin, le lien avec les jeunes maintenu via les réseaux sociaux pourrait également permettre d’améliorer la relation entretenue avec eux durant le confinement et de renforcer un contact déjà existant.
Le plaidoyer
Suite au recensement des besoins des jeunes dans cette période de crise, l’association mène un plaidoyer spécifique auprès des pouvoirs publics avec d'autres associations du Collectif "Ensemble contre la traite des êtres humains" et autres. Le but est d’inciter à mettre en place des mesures adaptées pour les personnes vivant en rue, squat ou bidonville, en particulier pour qu’elles soient mises à l’abri durant cette période.
Télécharger le communiqué adressé au premier ministre
Association Hors la Rue
Objectif
Depuis 2004 Hors la Rue a pour objectif d’accompagner les mineurs étrangers en danger vers le droit commun (parmi lesquels des mineurs présumés victimes de traite des êtres humains)
3 missions principales
Repérer les mineurs étrangers en danger,
Accompagner les jeunes vers le droit commun
Participer à une meilleure connaissance et prise en charge des problématiques des jeunes que nous accompagnons.
3 modalités d’actions
Des maraudes quotidiennes effectuées par une équipe pluridisciplinaire sur les lieux d’activité, de pause, d’errance et de vie
Un centre d’accueil de jour
Des permanences psychosociales en détention auprès de mineurs que nous avons déjà rencontrés en rue, en partenariat avec la PJJ.
Article écrit en collaboration avec Julie Jardin, chargée de mission de lutte contre la traite des êtres humains, à Hors la rue.