A l’origine, dans les années 1980, l’association Aux Captifs la Libération a créé les tournées de rue dans le but d’aller rencontrer à la rue les personnes qui s’y trouvaient, à la fois en situation de grande précarité mais aussi de prostitution. Aujourd’hui, les maraudes sont devenues un maillon essentiel de la prise en charge des victimes de traite.
Briser l’isolement et l’emprise par la création d’un lien gratuit et bienveillant
En France, les victimes de traite à des fins d’exploitation sexuelle vivent en vase clos, isolées de toute forme de lien extérieur au système prostitutionnel dans lequel elles sont enfermées.
A l’intérieur de celui-ci, elles n’ont d’autre lien que les relations nocives ou d’emprise qu’elles entretiennent avec les clients et les exploiteurs, au sein desquelles elles sont objectivées et considérées comme de simples marchandises.
Face à ce constat, les tournées rue ont pour objectif premier d’aller à la rencontre de ces personnes sur le terrain pour instaurer avec elles un lien gratuit, bienveillant et désintéressé, au travers duquel elles pourront retrouver leur statut de personne humaine et leur dignité.
Cette ouverture vers un autre mode de relation, basé sur la liberté et la confiance, est une étape indispensable qui permet aux victimes d’entrevoir et d’imaginer un avenir possible loin de l’exploitation.
Instaurer la confiance par la fidélité
La création d’un lien de confiance avec une personne victime de traite, habituée aux relations intéressées ou d’emprise, demande du temps. C’est pourquoi les tournées rue s’inscrivent dans la régularité et la fidélité.
Chaque parcours est effectué par des personne identiques, en binôme ou trinôme, à des horaires fixes toutes les semaines. Cette régularité permet d’être identifié, puis reconnu par les personnes avant d’entrer en relation.
A partir de là, un lien de confiance peut s’installer au fil des rencontres et des échanges, à l’intérieur duquel les victimes pourront exprimer leurs besoins.
C’est le préambule nécessaire à toute forme d’accompagnement dans la durée, à la libre initiative de la victime, vers la sortie d’exploitation et la réinsertion.
Un accompagnement global pour un nouveau projet de vie
Une fois le lien de confiance établi, un accompagnement global est proposé aux victimes de traite. Il inclut :
- Une assistance sociale pour répondre aux nécessités alimentaire, de logement et de santé
- Un suivi psychologique pour aider la personne à se reconstruire après les violences subies
- Un accompagnement juridique en vue de la régularisation et de la procédure judiciaire
- Des activités de dynamisation , artistiques ou sportives ainsi que des cours de Français ou d’informatique afin d’envisager la réinsertion professionnelle.
- Des ateliers professionnalisant dans la couture ou le bâtiment
- Des temps dédiés à la vie spirituelle.
Aux Captifs, la Libération
L’association Aux Captifs, la Libération est née en 1981 pour aller vers les personnes à la rue en situation de précarité à l’intérieur de Paris, aux Bois de Boulogne et Bois de Vincennes ; avec aujourd’hui 25 maraudes hebdomadaires à destination des personnes en situation de rue ou/et d’exploitation sexuelle ou de prostitution, parfois victimes de traite des êtres humains.
Elle a aussi des équipes bénévoles à Bordeaux, Lyon et Nîmes.
Le cœur de sa mission est d’aller à la rencontre des personnes sur leur lieu de vie et ou d’exploitation. L’idée est d’aider chacun et chacune à construire un projet de vie, pouvant aller jusqu’à la sortie de la prostitution.
Les équipes de bénévoles et de salariés ont développé une expertise dans la rencontre, l’identification, l’accueil et l’accompagnement des personnes.
L’association propose également des permanences d’accueil et un accompagnement global à travers accompagnement social, accès au soin et au droit grâce à un maillage associatif adapté.
Les propositions de l’association visent à favoriser la liberté de choix des personnes dans leurs parcours. L'association déploie des activités de mobilisation /dynamisation ainsi que des séjours de rupture, comme autant de leviers de reconstruction vers une capacité à exercer sa liberté voire une insertion.
L’identification spécifique des victimes de traite aux fins d’exploitation sexuelle, mineures et majeures, est une des priorités de l’association ; tout comme la sensibilisation des pouvoirs publics et de la société aux problématiques liées à la traite des êtres humains.
L’association est agréée depuis trois ans par l’Etat pour accompagner des parcours de sortie de prostitution.et de traite à des fins d’exploitation sexuelle.
Article écrit en collaboration avec Gilles Badin, directeur opérationnel à Aux captifs la libération, en charge du pôle prostitution, exploitation sexuelle et Traite des Êtres Humains.
