La pandémie de la Covid19 a montré combien les technologies de l'information et de la communication sont présentes dans nos activités et nos interactions sociales. Les technologies posent de nouveaux défis et ouvrent de nouvelles perspectives aux services répressifs et aux Organisations non gouvernementales (ONG) mais les informations restent faibles sur la traite des êtres humains en ligne et facilitée par internet.
L'étude présentée ici est une analyse de la traite en ligne et facilitée par la technologie fondée sur des informations factuelles recueillies de manière systématique auprès des Etats parties signataires de la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains complétées par des données provenant d'ONG qui accompagnent des personnes victimes et des entreprises de technologie.
Exploration des modes opératoires des trafiquants en matière de traite en ligne et facilitée par la technologie
L'étude évalue dans quelle mesure la technologie influe sur la traite des êtres humains et explore les modes opératoires des trafiquants permettant de relever les difficultés juridiques et opérationnelles que les Etats parties et les ONG rencontrent à chaque étape de la lutte dans ce domaine : détection, enquêtes et poursuites, identification des victimes et sensibilisation des groupes à risque.
L'étude présente aussi les stratégies, les outils et bonnes pratiques pour surmonter ces difficultés et renforcer l'action contre la traite en ligne ou facilitée par internet. Une attention particulière est portée à la formation car il est tout autant nécessaire de s'investir dans le capital humain que dans les ressources technologiques.
Cet outil contribuera à suivre l'évolution des technologies et des comportements.
Points saillants du rapport
L’impact important de la technologie sur la traite des êtres humains est particulièrement préoccupant dans deux phases du processus de traite : le recrutement et l’exploitation.
L'importance croissante des contenus, annonces et sites/applications en ligne pour la recherche d’emploi et l’importance croissante de la socialisation et des échanges personnels en ligne ouvrent des perspectives pour les trafiquants et accroissent les vulnérabilités existantes.
La technologie a changé la manière dont les gens entretiennent des relations et cela se répercute sur la criminalité, y compris la traite des êtres humains.
Il s’agit d’un changement structurel auquel les services répressifs et les systèmes de justice pénale doivent s’adapter.
De façon différente selon la forme d'exploitation, la technologie peut intervenir pendant la phase de recrutement en facilitant l’identification et la localisation des victimes potentielles ainsi que la prise de contact.
S’agissant du recrutement aux fins d’exploitation sexuelle, plusieurs États parties ont observé l’existence d’offres d’emploi liées à la traite et détecté des recrutements par le biais de plateformes de réseaux sociaux et d’applications de rencontre.
Dans plusieurs pays, de nombreux cas de chantage à l’encontre des victimes ont été constatés en utilisant des données pour les contraindre de se livrer à la prostitution.
Pendant la phase d’exploitation, la technologie peut faciliter la commercialisation des services sexuels fournis par les victimes de la traite.
De plus, la technologie peut être utilisée pour coordonner des activités.
Elle permet de séparer le lieu où l'activité sexuelle est pratiquée de celui où la coordination se déroule. Cela a des implications importantes pour les services répressifs.
Des outils technologiques sont employés par les trafiquants pour surveiller et contrôler les victimes pendant la phase d’exploitation.
Les nouvelles tendances relevées par plusieurs pays en matière d’exploitation sexuelle englobent l’essor des « webcams en direct » et des applications de chat vidéo « prépayées », et le recours croissant à des applications pour contrôler les victimes.
Dans le contexte de la traite aux fins d’exploitation par le travail, les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont surtout employées pour recruter des victimes, en particulier au moyen d’offres d’emploi en ligne. Une nouvelle tendance à propos de l’exploitation par le travail, concerne la hausse des recrutements par le biais d’internet et des réseaux sociaux.
Rien ne prouve que le dark web joue un rôle très important dans les affaires de traite où les victimes sont adultes (la diffusion de matériels relatifs à l’exploitation sexuelle d’enfants dépasse le cadre de la présente étude). Les cryptomonnaies ne semblent pas non plus très employées dans les affaires de traite (en revanche, elles sont utilisées pour payer des services de diffusion en direct d’abus sexuels sur des enfants).
Les ONG ont constaté qu’internet et les réseaux sociaux étaient employés à tous les stades de la traite des êtres humains et particulièrement :
- le recrutement ;
- l’exploitation ;
- l’exercice d’une emprise et d’une pression sur les victimes.
En outre, les trafiquants peuvent utiliser les TIC, notamment des réseaux sociaux et des applications cryptées, pour garder le contact avec les victimes de traite lorsque celles-ci ne se trouvent plus en situation d’exploitation – souvent pour les empêcher de déposer plainte et de se tourner vers la justice.
On assiste à une augmentation de l’exploitation des mineurs par la voie des webcams et des réseaux sociaux.
Les trafiquants commencent à utiliser les jeux vidéo pour entrer en contact avec des victimes potentielles.
Enfin, les données disponibles suggèrent que l’utilisation de la technologie ne remplace pas les relations personnelles dans le monde réel, mais les complète. La technologie et les échanges traditionnels doivent être plutôt considérés comme intégrés l’un à l’autre.
Télécharger le rapport disponible sur le site du Conseil de l'Europe